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Drame à l’aéroport de Donsin : voici les révélations faites en une semaine de procès

Le procès du drame survenu le 30 décembre 2022 sur le chantier de l’aéroport de Donsin, dans la région du Plateau central, a débuté le 20 février 2023 au Tribunal de grande instance de Ziniaré. L’Etat burkinabè et sept personnes sont poursuivis devant le Tribunal pour homicide et blessures involontaires. Après plus d’une semaine d’audience, que retenir de ce procès qui attise la curiosité des Burkinabè ?

Le 30 décembre 2022, la dalle d’un bâtiment du chantier de l’aéroport de Donsin s’est effondrée. Bilan, 7 morts et 6 blessés. Aussitôt, la police ouvre une enquête; ce qui a permis d’interpeller 7 personnes placées sous mandat de dépôt. Le 20 février, les prévenus ont comparu pour la première fois devant le Tribunal. Ils ont tous plaidé non coupable, mais à la barre, leurs déclarations, souvent contradictoires, révèlent de nombreuses irrégularités dans l’exécution des travaux.

Un « groupement fictif » décroche le marché de construction

Tout part de la passation du marché de construction de l’aéroport de Donsin. Attribué aux groupements GESEB SAS et COGEA International, le marché est exécuté uniquement par GESEB SAS, une société dirigée par Dieudonné Soudré. A la barre, Lamine Yalioré, directeur de COGEA International, déclare avoir pris part à l’appel d’offres en apportant seulement un apport financier à GESEB SAS afin qu’elle puisse honorer son chiffre d’affaires dans le cadre du marché. Il affirme que sa société n’a pas participé à l’exécution pratique des travaux. 

Dans ses déclarations, Lamine Yalioré soutient n’avoir pas de copie du contrat du marché, bien qu’il prétende s’être associé à GESEB SAS pour « peser lourd » afin de pouvoir le décrocher. « Je sais qu’on a des bâtiments, mais je ne peux pas rentrer dans les détails. Je suis un financier. Je ne peux pas dire quel type de bâtiment était en construction », avait-il déclaré. Des propos contestés par son partenaire d’affaires, Dieudonné Soudré, qui affirme que COGEA International était bien informée des travaux en cours sur le chantier.

Eu égard à ces contradictions, le Tribunal a jugé utile d’ajouter un nouveau chef d’accusation au dossier : « création d’un groupement fictif dans le but de fausser le jeu de la concurrence et tromper la vigilance de l’administration dans la passation de marché ».

De nouvelles contradictions 

Après les partenaires d’affaires, c’est autour du chef de chantier, Benjamin Lokossou, et du conducteur des travaux, Gildas Amoussou, deux Béninois, de se contredire devant le Tribunal. A la barre, Gildas Amoussou, recruté pour conduire les travaux sans avoir l’expérience requise, assure n’avoir jamais donné l’ordre à Benjamin Lokossou, de commencer les travaux avant la présence effective des contrôleurs, contrairement à ce que ce dernier a allégué devant le Tribunal à l’audience du 21 février 2023. 

« Si un ordre devait être donné, cela devrait émaner, dit-il, du directeur des travaux qui est chargé de l’intérim du conducteur des travaux lorsque ce dernier est absent », a-t-il déclaré. Sauf que le Tribunal s’est intéressé au motif de son absence sur le chantier le jour du drame. Il en ressort que Gildas Amoussou a bénéficié de 14 jours de congés, accordés par le chef de chantier, Benjamin Lokossou, alors qu’il n’est pas habilité à le faire.

Ingénieur de circonstance

Après les épisodes de contradictions, le procès du drame à l’aéroport de Donsin a livré d’autres secrets. Appelé à la barre, le directeur des travaux,  Joseph Traoré, 67 ans, a déclaré avoir apposé sa signature au bas du rapport sur la qualité des œuvres, en l’absence de l’ingénieur en charge des travaux. Disposait-il des compétences en ingénierie ? Non. Mais pour sa défense, il déclare avoir « quelques notions dans le domaine ». 

Dans son récit à la barre, Joseph Traoré a révélé des connivences entre ouvriers et la société de contrôle qualité (APAV) dans le prélèvement du béton. « L’absence du contrôleur n’a jamais retardé les travaux. Au contraire, APAV demande souvent de prélever le béton quand ils sont en retard ou absents », a-t-il fait savoir avant d’ajouter que s’il a eu la vie sauve dans ce drame, c’est parce qu’il s’est absenté quelques minutes pour se désaltérer.

Des animaux en divagation mis en cause dans l’effondrement !

A la question de savoir ce qui aurait pu provoquer l’effondrement de la structure, certains prévenus affirment ne pas pouvoir se prononcer. Mais Brahima Tou pense avoir une idée de la cause : « ce n’est pas un problème de structure ni de matériel. Pour parler de ces problèmes, il aurait fallu que la dalle ait été coulée en totalité avant de s’écrouler. Ici, je pense que c’est un problème d’étais métalliques, car le coulage de la dalle est supporté par les étais ». 

Il argumente ensuite que les animaux en divagation seraient à l’origine du drame : « le site n’est pas hautement sécurisé, il peut y avoir des actes de vandalisme. Même les animaux peuvent déranger les travaux préétablis ».

Le procès du drame à l’aéroport de Donsin réserve sans doute encore beaucoup de surprises. Les audiences reprennent le 2 mars 2023. Affaire à suivre donc !

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