Après quelques jours de pause, le procès du drame à l’aéroport de Donsin s’est poursuivi les 2 et 3 mars 2023 au Tribunal de grande instance de Ziniaré, dans la région du Plateau central. A la reprise des débats, le groupement GESEB SAS-COGEA International et l’État burkinabè ont été appelés à la barre.
Lors de l’audition de l’homme d’affaires Lamine Yaoliré, PDG de COGEA International, sur son rôle au sein du groupement qui a décroché des lots du marché de construction de l’aéroport, le procureur est sorti de ses gonds. A la question du parquet : « qu’est-ce que vous attendiez de ce groupement ? », Lamine Yaoliré répond : « la recherche de références similaires ». Une réponse que le procureur trouve « ahurissante».
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Avec un ton calme et ferme, le procureur demande aux responsables du groupement en cause de ne pas banaliser la mort des sept personnes survenue à cause de l’incident. « C’est la remarque que je veux faire afin que l’on puisse être clair et transparent. Ce va-et-vient entre la vérité et l’ombre n’est pas digne d’un Burkinabè », a-t-il indiqué.
Lamine Yaoliré est « accusé d’être à l’origine » du drame survenu le 30 décembre 2022 sur le chantier de l’aéroport de Donsin. Pour le procureur, c’est inadmissible que l’entreprise du prévenu fasse partie du groupement et ne participe pas aux travaux du chantier. Selon les propos de Yaoliré, la seule dépense qu’il a effectuée dans le cadre de ce groupement était d’ordre administratif. Il fallait rassembler les papiers nécessaires pour permettre de soumissionner en tant que groupement. « Cela ne m’a pas coûté plus de 40 mille francs ».
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« On a fait une mauvaise lecture de votre personne», lui déclare le procureur. Des mots qui semblent soulager le prévenu qui a même murmuré un petit merci presque inaudible quand le procureur a ajouté d’un ton beaucoup plus fort : « On vous prenait pour une victime, mais on se rend compte que vous êtes à la base de ce qui s’est passé le 30 [décembre 2022] ».
Quand Yaoliré a voulu présenter ses excuses et dire que ce n’était pas dans ses intentions de banaliser la mort de ces personnes, il a très vite été recadré par le procureur : « je suis convaincu que vous ne regrettiez pas ce qui s’est passé. Vous les hommes d’affaires, ce qui vous intéresse, c’est votre argent. Peu importe que des pauvres meurent ». Tout ceci sans qu’aucune personne dans la salle ne pipe mot, même pas l’avocat du prévenu qui s’est juste contenté d’un sourire en coin.
Yaoliré ne voulait pas être mêlé à l’histoire
Ce qui énerve tant le procureur, c’est le double jeu supposé de Yaoliré. Après toutes ces remontrances, il lui a posé la question « Vous n’avez pas dit que vous espérez que votre nom ne sortirait pas dans l’affaire ? ». Question à laquelle le prévenu répond sans sourciller ¨NON¨.
Le procureur appelle alors M. Soudré, le patron de GESEB SAS, qui était assis la tête baissée, à répondre à la question. « Je ne me rappelle plus de la date, mais il me semble qu’il a dit qu’il espère que son nom n’allait pas sortir dans l’affaire». Exaspéré par l’incertitude de Soudré, il lit la déclaration préliminaire de ce dernier qui disait, entre autres, « J’ai informé le PDG de COGEA et il est venu sur le site. Il est venu me voir pour savoir comment j’allais m’y prendre pour que son nom ne sorte pas ».
« Notre seul manquement, c’est d’avoir versé 20 % au lieu de 30 % »
L’Etat burkinabè comparait également en tant que prévenu. Il est accusé d’homicide et blessures involontaires. Il lui est reproché de n’avoir pas fourni à temps les ressources financières au groupement chargé des travaux et d’avoir autorisé la poursuite des travaux malgré la suspension des délais d’exécution du groupement chargé du contrôle, Memo Sarl-excel ingénierie.
L’Etat est représenté par l’agent judiciaire de l’Etat (AJE) en la personne de Karfa Gnanou. Pour lui, leur seul manquement serait d’avoir versé 20 % au lieu de 30 % en matière d’avance. Le principe en la matière est le paiement après la totalité des travaux. L’entreprise qui obtient un marché comme celui du chantier de Donsin doit être financièrement stable. Ce qui a certainement conduit à la formation du groupement GESEB SAS – COGEA International.
« La suspension des délais ne suspend pas les travaux, mais permet de rattraper le temps perdu et empêcher que le délai contractuel s’épuise et empêche d’établir un autre contrat », selon l’AJE qui suppose que la chute du coulage de la dalle est dû au système d’étayage. « Nous n’avons pas à nous prononcer sur les autres aspects concernant le mystique », affirme-t-il.
Le procès se poursuit aujourd’hui au Tribunal de grande instance de Ziniaré.