Le mouvement Servir et non se servir (SENS) estime que l’heure est grave. « Nous constatons, chaque jour, que le pays est en train d’emprunter, de manière résolue et déterminée, le chemin du non droit, où aucune voix discordante n’est tolérée, fût-elle constructive. Même dans le cadre du strict exercice de leurs fonctions, certains citoyens sont inquiétés », affirme-t-il dans une déclaration datée de ce 18 août. Il pointe ainsi du doigt les récentes réquisitions de magistrats pour « participer aux opérations de sécurisation du territoire ».
Selon le Mouvement à caractère politique SENS, le MPSR 2, dirigé par le Capitaine Ibrahim Traoré, est en train de s’éloigner des missions qu’il s’était assignées à sa prise de pouvoir. Dernière actualité à polémiques : les réquisitions de magistrats pour le front. Cette information a été confirmée par l’Intersyndicale des magistrats dans une déclaration datée du 16 août. « Si l’on s’en tient aux termes de ce communiqué, sept (07) magistrats seraient concernés par ces ordres de réquisitions émis par le Commandement des opérations du théâtre national (COTN) », indique le mouvement SENS. Selon les syndicats de magistrats, ces réquisitions font suite à « des décisions prises par ces magistrats dans le cadre de leurs fonctions respectives à l’encontre de citoyens présentés comme étant des soutiens du régime en place », rappelle le mouvement. Et il ne se limite pas là : « Ces ordres de réquisitions ont été déférés devant les juridictions administratives qui ont enjoint « à l’État burkinabè de ne donner aucun effet à ces ordres de réquisitions » en raison de leur caractère illégal ».
Mais ces réquisitions ont été exécutées, déplore le mouvement SENS. Certes, « la défense du Burkina Faso est, dit-il, un devoir pour tout Burkinabè. Si la nécessité l’exige, tous autant que nous sommes, nous devrions abandonner nos activités quotidiennes pour défendre notre Patrie avec fierté ». Mais dans ce cas de figure, et dans les précédentes réquisitions, il estime qu’il y a problème. « Pour le MPSR, amener certains citoyens au front est une punition réservée à ceux qui refusent la pensée unique ou de se soumettre au diktat des Princes du moment ».
D’ailleurs, concernant le cas des magistrats, le SENS affirme que l’on avance inexorablement vers le glas de la Justice : « A travers la réquisition de magistrats, représentants du pouvoir judiciaire, le régime du MPSR a touché le fond. Si la justice ne doit plus être rendue conformément à notre droit positif et au nom du Peuple du Burkina Faso mais plutôt sur les diktats et les désidératas des Princes du moment, il est temps, sans faux fuyants, de constater la mort du pouvoir judiciaire et sans désemparer, organiser ses funérailles », affirme-t-il, visiblement dépité.
Il décrit ainsi un tableau qui tend à accentuer la discrimination entre des citoyens d’un même pays. En quelque sorte, un système à géométrie variable : « On envoie, dit-il, au front ceux qu’on présente comme « apatrides », « valets locaux » de l’impérialisme, « ennemis » du pays, tandis que les « patriotes », les « souverainistes » se retrouvent loin des théâtres des opérations, dans des bureaux climatisés et des voitures rutilantes ». Il y a également, dans la déclaration, cette phrase lourde de sens : « Des Burkinabè formés et rompus à l’art de la guerre sont déployés dans des emplois civils, dans des ambassades à l’étranger, et les moins chanceux arrêtés arbitrairement et séquestrés dans des prisons du MPSR ».
Le Mouvement affirme sa « solidarité à l’ensemble des magistrats réquisitionnés pour le front ainsi qu’à leurs familles respectives ». Il invite les acteurs de la chaîne judiciaire « à rester républicains, dignes, intègres et résilients dans l’accomplissement de leurs nobles missions ». Clin d’œil également à « tous les citoyens de toutes les catégories, enlevés, réquisitionnés, emprisonnés injustement ou subissant l’arbitraire et l’injustice du pouvoir militaire du MPSR ».
Le message du SENS se veut formel : rechercher impérativement « l’Union sacrée pour faire face aux terrorismes ». Sauver également « les acquis de l’Etat de droit et sauvegarder nos valeurs d’intégrité, de dignité, de solidarité et de justice sociale ». Ces valeurs constituent, dit-il, le « socle de notre vivre-ensemble et de notre cohésion sociale et nationale ».