Les récentes réquisitions menées par le gouvernement de Transition continuent de susciter des réactions au sein des acteurs de l’espace public burkinabè. Ce 10 novembre, le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) donne de la voix.
Le REN-LAC déclare « observer, depuis quelques jours, une vague de réquisitions ciblées de citoyens, soi-disant en application du décret portant mobilisation générale et mise en garde ».
Pour cette structure de lutte contre la corruption, « la qualité des personnes concernées (…) ne laisse aucun doute sur les motifs réels de ces réquisitions ».
Selon le REN-LAC, la plupart des personnes réquisitionnées sont des journalistes ayant des opinions critiques vis-à-vis du pouvoir, des hommes politiques et des leaders d’opinions. Certains de ces leaders d’opinion sont membres du collectif d’organisations syndicales et de la société civile qui avait annoncé la tenue d’un meeting le 31 octobre pour commémorer le 9e anniversaire de l’insurrection populaire d’octobre 2014, le 8e anniversaire de la résistance au coup d’État de septembre 2015, et interpeller l’Exécutif sur certains aspects de la gouvernance.
Ces réquisitions « ont pour objectif inavoué de réprimer des Burkinabè dont le seul « tort » est d’avoir osé s’exprimer sur la conduite des affaires de l’État d’une manière qui ne rencontrerait sans doute pas l’assentiment des tenants actuels du pouvoir », indique le communiqué.
Selon le REN-LAC, ces réquisitions s’écartent de l’esprit de la loi en la matière.
« Cette attitude des autorités de la transition ne s’inscrit nullement dans l’esprit du décret portant mobilisation générale et mise en garde. Ce décret doit être un instrument de lutte contre le terrorisme. En conséquence, il ne saurait être un moyen de répression des personnes qui émettent des avis contraires ou qui interpellent les autorités sur la marche de la cité afin d’éviter la pensée unique », martèle le REN-LAC.
« Dire non à l’arbitraire »
Dans son communiqué, le REN-LAC demande aux autorités de la Transition d’annuler les réquisitions.
Il interpelle le gouvernement sur ce qu’il appelle « le caractère arbitraire et injuste des réquisitions en cours dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ».
Le REN-LAC exhorte les autorités « à garantir les libertés démocratiques individuelles et collectives et à prêter une oreille attentive aux interpellations citoyennes contre les manquements à la gouvernance. Toute chose nécessaire pour venir à bout du terrorisme ».
Il « appelle également l’ensemble des démocrates épris de justice et de paix à se mobiliser pour dire non à l’arbitraire, à l’injustice et à l’abus d’autorité d’où qu’ils viennent ». Il exprime aussi son attachement « aux principes de bonne gouvernance, de l’intégrité et de l’État de droit.
Une dizaine de personnes en majorité des membres de la coalition de syndicats et d’organisations de la société civile, qui avaient annoncé un meeting pour le 31 octobre à la Bourse du travail, ont été réquisitionnées pour servir sur le théâtre des opérations de lutte contre le terrorisme.
Cela a suscité de vives réactions au sein de plusieurs organisations syndicales et de la société civile. Elles estiment que ces réquisitions sont « arbitraires et constituent des sanctions ».
Cette situation a engendré un climat tendu entre le gouvernement et les syndicats, en témoigne le report de la rencontre annuelle gouvernement/syndicats qui devait débuter le 7 novembre.
Les réquisitions prennent effet à compter du mardi 7 novembre. Toutefois, selon Radio Oméga, les personnes réquisitionnées n’avaient pas encore rejoint le front à la date du 8 novembre.
Si le journaliste Yacouba Ladji Bama et le président du parti « Le Faso Autrement », Ablassé Ouédraogo, sont hors du pays, les autres sont à Ouagadougou mais « en lieu sûr » selon les sources de la Radio.