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Tribunal de Bobo-Dioulasso : des agents de la mairie de Dédougou reconnus coupables de surfacturation

L’ex-maire de la commune de Dédougou, Karim Kondé, le responsable des marchés publics de la commune, Hubert Zongo, le Directeur régional du Contrôle des marchés et des engagements financiers de la Boucle du Mouhoun (DRCMEF), Georges Millogo, deux de ses collaborateurs et quatre responsables d’entreprises d’exécution de marchés publics ont comparu, ce 22 septembre, au Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso. Ils sont poursuivis pour des faits présumés de corruption dans la  commande publique, de surfacturation, de favoritisme, d’abus de fonction et de complicité.

Les principaux accusés dans ce dossier sont le responsable des marchés publics de la mairie, Hubert Zongo, et un agent de la Direction régionale du contrôle des marchés publics dans la Boucle du Mouhoun, Innocent Kaboré. Les événements remontent à 2021. Des investigations, il ressort que les deux agents publics ont profité de leurs postes pour effectuer des surfacturations dans la commande publique, dans le cadre de l’acquisition de fournitures scolaires pour des Circonscriptions d’éducation de base (CEB 1, CEB 2, CEB 3) de la ville de Dédougou. Ils ont  également procédé à des manipulations de chiffres pour l’achat d’un véhicule pick-up pour le compte de la commune de Dédougou. 

Concernant le premier marché, pour un montant initial de 10 millions FCFA, des agents publics ont procédé à une majoration jusqu’à 14 millions FCFA. Le deuxième marché est passé de 24 millions à 26 millions FCFA. Le troisième marché, lui, est passé de 12 à 14 millions de francs. Cependant, pour l’achat du pick-up, une baisse du montant initial a été constatée. De 25 600 000 FCFA, il est descendu à 23 000 000 FCFA sur les documents. 

À la barre, les principaux prévenus expliquent que ces manipulations visaient à faciliter l’acheminement des mobiliers jusqu’à la destination finale. Selon eux, aucune mauvaise intention ne les animait. Après décaissement et exécution des marchés, disent-ils, aucun commerçant ne leur a versé un quelconque « surplus ». 

Devant les juges, les quatre commerçants s’attachent à la même version. Ils expliquent que les agents publics les ont contactés pour qu’ils augmentent les prix. Cependant, ils rassurent que M. Kaboré et M. Zongo n’ont rien réclamé à la suite de l’exécution des marchés. Selon le parquet, cette version renferme des zones d’ombre car, au lieu d’augmenter les prix, en tant que représentants de l’État, les deux agents publics auraient dû  être satisfaits que les commerçants aient proposé des prix acceptables. 

Dans le dossier, les autres accusés comme l’ex-maire de Dédougou, Karim Kondé, le DRCMEF de la Boucle du Mouhoun, Georges Millogo, et les autres membres de la mairie, qui étaient membres de la commission d’attribution, comparaissent comme complices. Selon le parquet, le décaissement des montants manipulés ne pouvait se faire s’ils n’avaient pas donné leur accord.

L’ex-maire, Karim Kondé, se défend en ces termes : « J’avais confiance en eux, c’est pourquoi cela est passé sans que je ne m’en rende compte. Si je savais que ces chiffres étaient manipulés, jamais je n’aurais donné mon accord pour le décaissement ». Les autres présumés complices affirment également qu’ils n’étaient « au courant de rien ». Les principaux accusés confirment ces versions. 

Après les différentes plaidoiries, le parquet a demandé la requalification des faits, en abus de fonction, favoritisme et complicité. Il requiert que les agents publics soient reconnus coupables des faits qui leurs sont reprochés. En répression, il demande la condamnation de Hubert Zongo et Innocent Kaboré à 60 mois de prison dont 12 fermes et au paiement d’une amende ferme de 10 000 000 FCFA. 

À l’endroit des quatre commerçants, Saïdou Ouédraogo, Leonel Ilboudo, Jean Baptiste Simporé et Ousseni Compaoré, il requiert 12 mois de prison assortis de sursis et une amende ferme de 1 000 000 FCFA. Le parquet demande la relaxe de l’ex-maire, Karim Kondé,  du DRCMEF, Georges Millogo, des membres de la commission d’attribution des marchés, Balantier Ouattara et Boureima Compaoré, pour infractions non constituées.

Lors du procès, les parties civiles, notamment le Réseau  national de lutte anti-corruption (REN-LAC) et l’Autorité supérieure de contrôle d’État et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC) ont respectivement réclamé 1 000 000 FCFA et 3 600 000 FCFA à titre de dommages et intérêts. La commune de Dédougou, également partie civile, n’était pas présente à l’audience.

Le Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement en matière correctionnelle et en premier ressort, a requalifié les faits en abus de fonction, favoritisme et complicité. Il déclare Hubert Zongo et Innocent Kaboré coupables des faits qui leur sont reprochés. Etl les condamne, chacun, à 12 mois de prison assortis de sursis et au paiement d’une amende de 1 000 000 FCFA ferme. 

Il condamne également les quatre commerçants à une peine de 12 mois de prison et au paiement d’une amende de 2 000 000 FCFA, le tout assorti de sursis. 

Le Tribunal ordonne la relaxe de l’ex-maire de la commune de Dédougou, Karim Kondé, du Directeur régional du Contrôle des marchés et des engagements financiers de la Boucle du Mouhoun, Georges Millogo, des membres de la commission d’attribution des marchés, Balantié Ouattara et Boureima Compaoré, pour infractions non constituées.

Il ordonne également aux six personnes reconnues coupables de payer 1 000 000 FCFA au REN-LAC et 1 franc symbolique à l’ASCE-LC.

Léandre Sosthène SOMBIE (Bobo-Dioulasso)

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