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Lutte contre le terrorisme au Burkina : les paramilitaires au front, les populations entre satisfaction et inquiétudes

Lors de la conférence des commissaires de police, tenue à Ouagadougou le 9 février 2023, le chef de l’Etat burkinabè, le Capitaine Ibrahim Traoré, a appelé les forces paramilitaires à se préparer à rejoindre les militaires sur le front de la lutte contre le terroriste. Suite à cet appel, les avis divergent. C’est le constat fait par 24heures.bf lors d’un micro trottoir à Bobo-Dioulasso.

Le président du Faso a été formel : «Lorsque nous allons définir les types d’unités à constituer, il n’y aura pas d’excuses, ni de pardon pour un porteur de tenue, qui va trouver qu’il ne doit pas aller au front. Tout le monde ira ». Plus question de faire la différence entre les différents corps de l’armée burkinabè. « On va combattre ensemble sur le même terrain », a-t-il indiqué. Suite à ces propos du chef de l’Etat aux hauts cadres de la police nationale, une question majeure taraude l’esprit des Burkinabè : comment se fera la réorganisation des forces armées pour assurer toutes les fonctions régaliennes de l’Etat ?

« Et la sécurité urbaine ? »

Pour Roland H., étudiant en pharmacie, la guerre contre le terrorisme ne doit pas être mise en avant au détriment de la sécurité urbaine, car, dit-il, « il y a des personnes malveillantes, malintentionnées dans les centres urbains, à savoir les délinquants, les voleurs, les inciviques et autres bandits qui profiteraient du déploiement des policiers sur les fronts de guerre« . Mais « si la question est bien paramétrée, il n’y aura pas de problème », concède-t-il.

« Qu’on les forme d’abord… »

D’après Ardane N., étudiant étranger résident au Burkina,  il faudra prévoir une nouvelle formation aux paramilitaires qui seront déployés au front. « S’ils doivent aller au front comme les militaires, il faut qu’on leur donne de vraies armes de défense, et qu’on les forme. Sinon, la situation du pays est préoccupante et chacun à son niveau doit fournir l’effort pour cela », précise-t-il. 

Pour un citoyen qui a requis l’anonymat, il est vrai que les paramilitaires ne sont pas habitués à ce type de combat, mais toujours est-il qu’ils sont nettement plus formés et préparés que les VDP. À coup sûr, rassure-t-il, il suffira de quelques recyclages, peut-être leur montrer les règles basiques d’une guerre asymétrique, comment manipuler une arme de guerre et trouver une stratégie pour s’adapter à ce conflit qu’est le terrorisme.

Un avis que partage Stéphane K., employé dans une société de la place. « Etant donné qu’ils ont une formation différente de celle des militaires, il faudra peut-être leur donner des séances de formation en stratégie de guerre contre le terrorisme avant de les envoyer sur le champ de bataille », dit-il. Roland H. opte également pour un renforcement de capacité des paramilitaires. Mais selon lui, les critères de sélection doivent être analysés au préalable. 

« Il faudra qu’ils soient au même niveau que les militaires. Il doit y avoir une cible de personnes dans les différents corps. On doit privilégier une tranche d’âge, notamment les jeunes, car ce n’est pas la peine de prendre des personnes âgées et des personnes malades pour les obliger à aller au front », explique-t-il.

Une situation exceptionnelle

Selon Abdoul B., « le fait qu’on a appelé les policiers, les douaniers, les forestiers pour aller aider les militaires, c’est une bonne idée. C’est l’union qui fait la force. Comme eux aussi leur rôle, c’est de veiller à la protection des personnes, je trouve cela appréciable ».

Contrairement à Abdoul, Sylvie O., étudiante à Bobo, pense que l’on ne devrait pas contraindre les policiers et les autres forces armées, notamment les paramilitaires, à aller au front comme les militaires, car ils n’avaient pas été recrutés sur cette base. «Exiger aux forces paramilitaires de se rendre au front comme les militaires, je n’approuve pas cette idée, parce qu’elles n’ont pas été formées pour ça », estime-t-elle.

Pour soutenir son point de vue, elle prend en exemple les policiers qui sont des forces de sécurité, mais qui n’ont pas forcément l’habileté, ni l’expérience dans la défense. Mais revient-elle, « étant donné que la situation est exceptionnelle, on peut au moins les solliciter, et non les contraindre« . 

A l’opposé de Sylvie, le citoyen qui a requis l’anonymat est dans la même logique que le chef de l’Etat. « Si on peut former un VDP en moins de trois mois et l’envoyer au front, ce n’est pas un policier qui est déjà aguerri, qui ne pourra pas le faire », déclare-t-il. Selon lui, le chef de l’Etat n’avait même pas besoin de lancer cet appel pour que les gens s’y mettent, surtout en ce moment où le pays fait face à une adversité terroriste. 

Pour Stéphane K., si on suppose qu’appartenir au corps des paramilitaires est motivé par le plaisir de protéger des personnes, l’appel du chef de l’Etat devrait être accueilli positivement. Roland H., lui, pense que les forces paramilitaires sont des fonctionnaires de l’Etat ; donc, si le devoir les appelle, quelle que soit  la situation, ils doivent répondre impérativement. 

« Ce sont des fonctionnaires de l’Etat, et en fonction de leur appellation commune, hommes de tenue, on voit en eux des défenseurs de la population, des garants de la sécurité. Du coup, c’est leur mission d’aider les militaires à libérer le pays », conclut-il.

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