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Côte d’Ivoire : Absents de la liste électorale provisoire, Gbagbo, Soro et Blé Goudé protestent

La date de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire avance à grand pas. Dans le cadre de cette échéance électorale, la Commission électorale indépendante (CEI) a publié, le 17 mars dernier, une liste électorale provisoire. On note l’absence de certains “acteurs politiques majeurs”. Il s’agit notamment de Laurent Gbagbo, ancien président et leader du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), Charles Blé Goudé, ancien ministre et leader du Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP), et Guillaume Soro, ancien président de l’Assemblée nationale ivoirienne et président du parti Générations des peuples solidaires (GPS). Ces absences de la liste provisoire suscite de vives réactions au sein de leurs formations politiques. Dans une déclaration publiée aujourd’hui, le GPS dont le leader Guillaume Soro est en exil, estime qu’il s’agit d’une “volonté manifeste du pouvoir en place d’éliminer arbitrairement des adversaires politiques en vue de l’élection présidentielle de 2025”. Le GPS dit alors exiger “la garantie d’un processus électoral transparent, inclusif et respectueux des principes démocratiques”. 

L’absence de la liste électorale provisoire de ces leaders de partis politiques suscite des gorges chaudes. Elle est interprétée comme une volonté du régime du Président Ouattara de les écarter de la prochaine élection. En effet, la présence sur la liste électorale est une condition préalable pour être candidat. Même si aucune raison officielle n’a été avancée concernant ces absences, leurs déboires avec la justice ivoirienne pourraient en être la principale cause. En avril 2020, Soro avait été condamné à 20 ans de prison pour “recel et détournement de deniers publics”. Il sera par la suite condamné à la prison à perpétuité pour « atteinte à la sûreté de l’État » en juin 2021. Charles Blé Goudé et Laurent Gbagbo ont été acquittés en première instance et en appel par la Cour pénale internationale (CPI) respectivement en 2019 et 2021. Ils étaient alors poursuivis pour “crimes contre l’humanité prétendument perpétrées en Côte d’Ivoire en 2010 et 2011”. Mais les deux sont sous le poids de décisions de justice en Côte d’Ivoire. Gbagbo a écopé d’une condamnation par contumace à 20 ans de prison dans l’affaire dite “braquage de la BCEAO”. Blé Goudé a, lui, été condamné par contumace dans l’affaire pour laquelle il a été acquitté par la CPI.

Et chacune des organisations politiques concernées présente ses arguments et preuves.

Le GPS dit avoir constaté “avec indignation la non-inscription de son Président, M. Soro Kigbafori Guillaume, sur la liste électorale provisoire en Côte d’Ivoire”. Cela, dit-il, en dépit des “décisions contraignantes” de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP). Selon lui, par deux décisions rendues en 2020, la CADHP a ordonné à l’État ivoirien de lever immédiatement tous les obstacles empêchant Guillaume Soro de jouir de ses droits d’élire et d’être élu”. Ces décisions, selon le GPS, sont juridiquement contraignantes pour l’État ivoirien. Et ne souffrent d’aucune ambiguïté. “Elles imposent la réintégration de M. Soro sur la liste électorale”, a-t-il déclaré.

Pour le GPS, en refusant d’appliquer ces arrêts, les autorités ivoiriennes bafouent non seulement un engagement international, mais aussi les principes fondamentaux de l’État de droit. Il estime que l’absence de Soro, Gbagbo et Blé Goudé sur la liste électorale provisoire “révèle une volonté manifeste du pouvoir en place d’éliminer arbitrairement des adversaires politiques en vue de l’élection présidentielle de 2025”.

“Face à cette nouvelle atteinte aux libertés, M. Soro réaffirme avec force son engagement indéfectible contre l’exclusion et l’injustice en Côte d’Ivoire”, martèle le parti.

Et d’ajouter ceci : “Notre engagement pour un véritable État de droit et des élections inclusives ne faiblira pas. Nous mènerons ce combat avec détermination et nous le remporterons”. Le GPS tire la sonnette d’alarme : “Nous en appelons à l’opinion nationale et internationale à se saisir de cette grave violation des droits civiques et politiques en Côte d’Ivoire et à agir pour que l’élection présidentielle de 2025 ne soit pas une réédition des scrutins sanglants du passé, marqués par la violence, la répression et des pertes en vies humaines”.

Le parti exige la réintégration de Soro, Gbagbo et Blé Goudé sur la liste électorale. Ainsi que la garantie d’un “processus électoral transparent, inclusif et respectueux des principes démocratiques”.

Place maintenant à Charles Blé Goudé. Dans une interview accordée à la télévision française TV5 Monde, ce leader politique dénonce avec force, son absence de la liste électorale provisoire. Il indique cependant avoir vu les choses venir. “Je ne suis pas surpris de mon absence sur la liste électorale. Tout était mis en œuvre pour qu’on arrive à cela”. Il estime par contre que la décision de ne pas l’inscrire sur la liste électorale “est basée sur du faux”.

“Je suis jugé par contumace, c’est-à-dire à mon absence, pendant que j’étais à la Haye. Lorsque vous jugez une personne par contumace, il y a une condition. Regardez cet huissier de justice qui se rend à mon domicile de Yopougon et qui demande à mes voisins où est Charles Blé Goudé et ils disent : on ne sait pas. Pendant ce temps, tout le monde savait que j’étais à la Haye. Je ne ne pouvais pas être à la Haye et être en Côte d’Ivoire à la fois”, a-t-il expliqué.

“C’est sur la base de ce faux que j’ai été condamné à 20 ans de prison, ce que je dénonce”, affirme-t-il.

“Aucune justice dans ce monde ne peut encore me juger conséquemment aux événements de la crise postélectorale de 2011. Or, c’est sur cette base que j’ai été condamné. Ce n’est pas juste. On ne joue pas avec la justice”, a-t-il tancé. Rappelant cependant que cette liste n’est que provisoire.

Et il poursuit : “Je continue de dénoncer le fait que je suis jugé et condamné pour des faits pour lesquels j’ai été acquitté. J’ai fait plusieurs années de procès à la Haye. J’ai été acquitté en première instance et en appel. Comment condamner une personne pour des faits pour lesquels il a déjà été jugé? Voilà ce que je dénonce. On cherche à m’empêcher de participer à la vie politique de mon pays”. Il entend déposer un recours.

Le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP) dont il est le leader prévoit une conférence de presse aujourd’hui afin de se prononcer sur son absence de la liste provisoire.

Un autre grand absent de la liste électorale provisoire : L’ancien Président Laurent Gbagbo. Lui également avait été acquitté en première instance et en appel par la Cour pénale internationale respectivement en 2019 et en 2021. Il était alors poursuivi pour “crimes contre l’humanité prétendument perpétrées en Côte d’Ivoire en 2010 et 2011”.

“Nous condamnons sans réserve les actions de la CEI qui consistent à exclure et à entraîner des provocations contre une grande partie de la population ivoirienne”, a déclaré le PPA-CI, le parti de Gbagbo après la publication de la liste. Le parti invite ses militants et sympathisants à “suivre les consignes de la direction du parti dans le cadre du contentieux électoral. Et à se tenir prêts pour les futurs mots d’ordre”.

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