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Burkina Faso/Liberté de presse : Un panel à  Bobo-Dioulasso sur le journalisme en temps de crise

En marge de la 20e édition de la Semaine nationale de la culture (SNC), Studio Yafa a organisé un panel ce 5 mai 2023 à Bobo-Dioulasso,  sous le thème  » Quel journalisme dans un Burkina en crise « . Les panélistes  ont débattu sur les difficultés auxquelles font face la presse burkinabè.

Selon le journaliste Bouraïma Salouka, la pratique du journalisme est devenue de plus en plus difficile au Burkina Faso pour plusieurs raisons. Il cite entre autres la dégradation de la situation sécuritaire et la pression non seulement des gouvernants mais aussi de la population.  » Cela fait que les journalistes se font des autocensures. En réalité, ils évitent certains sujets dans leurs productions. Je vois par exemple des gens qui portent atteinte même à l’ordre démocratique, mais les journalistes n’en parlent pas. Certains sujets d’envergure sur l’armée sont aussi évités par la presse « , regrette M. Salouka. Pour lui, dans cette situation de crise, les journalistes doivent s’affirmer et travailler avec professionnalisme sans être inquiétés. Membre de l’Observatoire burkinabè des médias, Abibata Kouldiaty pense que les hommes de médias doivent éviter de parler des sujets qui fâchent.  » Maintenant les journalistes doivent aborder les sujets autrement. Avec la précarité et la situation sécuritaire difficile, la société civile n’a pas de grand budget pour faire appel à la presse. Mais c’est à la presse aussi de savoir s’inviter dans certaines activités « , indique Mme Kouldiaty. 

La marchandisation du reportage 

Enseignant en journalisme, Dr Seydou Dramé déclare que le journalisme au Burkina Faso à un problème.  » Aujourd’hui, c’est un journalisme commercial que nous avons de plus en plus. Quand vous allez appeler un journal pour une activité, il va vous tendre une facture. Si vous n’arrivez pas à honorer la facture, il ne vient pas. C’est une marchandisation du reportage. Ça, c’est la maladie que j’ai personnellement dénoncée depuis longtemps « , avance Dr Seydou Dramé. Pour le journaliste Dramé, les vrais reportages ont remplacé les publi-reportages dans les rédactions. Selon lui, la crise a un impact sur le journalisme. Il revient par ailleurs sur la liberté de la presse.  » Une chose est de jouir d’une liberté, une autre est de pouvoir l’exercer. 

Salouka, lui, trouve que c’est le journalisme qui peut impacter la crise.  » La pratique journalistique est aujourd’hui axée sur l’organisation administrative du pays. On s’intéresse à ce qui se passe à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso. Ainsi, l’intérieur du pays est oublié. On ne parle de ces localités que quand une autorité politique y est « , souligne-t-il. « Bien avant les coups d’Etat, celui qui était élu démocratiquement avait fait un système où il ne faut pas aborder la question du terrorisme. C’est là que la maladie s’est propagée et on ne peut plus la cacher « , dit-il. Selon Bouraïma Salouka, même si les journalistes désirent aller dans les fins fonds du pays pour rapporter l’information, cela est aujourd’hui difficile à cause des menaces qui se dressent à eux. 

Tenir compte de l’éthique et de la déontologie 

Il ajoute que les médias qui n’ont pas été regroupés en entreprises de presse sont incapables de doter les journalistes en moyens pour faire efficacement leur travail.  » C’est facile de dire que les autorités nous empêchent de travailler, mais objectivement on a pas cette structure qui permet de faire des reportages de guerre », regrette le journaliste Salouka. 

Comme solution pour une meilleure efficacité des journalistes, Abdoulaye Ouattara pense à la formation.  » Les journalistes doivent être bien formés à la pratique du métier dans ce contexte « , fait-il savoir. Abibata Kouldiaty, elle, pense que les autorités doivent discuter de façon claire avec les médias pour savoir ce qui ne va pas et résoudre la situation.  » Les journalistes sont aussi des Burkinabè. Si ensemble, les deux parties discutent, ils peuvent converger vers des résultats positifs et dresser une feuille de route « , signifie la représentante de l’OBM. Victimes de menaces verbales, selon les panélistes, les journalistes doivent traiter leurs sujets en tenant compte de l’éthique et la déontologie.  » Vous ne pourrez pas plaire à tout le monde. Mais faites tout votre possible pour respecter les codes d’éthique et de déontologie « , lance Mme Kouldiaty. Par ailleurs, elle souligne que les journalistes doivent tenir compte du contexte avant toute production. 

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