Le ministère de la Défense et des Anciens combattants a tenu, ce 19 octobre, une cérémonie commémorative de la « journée du Tirailleur africain » à la « Place de la Nation », à Ouagadougou. Cette cérémonie, présidée par le ministre de la Défense, le Colonel-major Kassoum Coulibaly, a permis de rendre hommage à ces hommes qui ont combattu au nom du drapeau burkinabè, aujourd’hui à la retraite.
Ils étaient plusieurs dizaines, des anciens éléments de l’Armée burkinabè à participer à cette cérémonie. Dépôt de gerbe au pied du Monument aux morts et reconnaissance du ministre Kassoum Coulibaly à l’endroit des Anciens combattants ont marqué la cérémonie d’hommage célébrée de façon sobre.
« Merci à vous. Nous prions pour vous; bénissez-nous en retour et que le pays aille de l’avant. Merci chers Anciens », a déclaré le Colonel-major Kassoum Coulibaly.
Le Commandant à la retraite Jean-Pierre Kaboré est le vice-président de l’Association des anciens combattants, anciens militaires, veuves, orphelins et victimes de guerre du Burkina.
Pour lui, cette journée renouvelle la solidarité de son association avec ses ancêtres « qui se sont battus de force pour libérer la France ». L’absence de certains de ses aînés qui ont combattu lors des deux guerres mondiales, à la cérémonie, est due, dit-il, au poids de l’âge.
« On les appelait Tirailleurs sénégalais parce qu’ils ont été embarqués de force pour aller combattre pour le colon. Aujourd’hui, ils sont des tirailleurs africains parce que la majorité n’étaient pas Sénégalais. Nous célébrons cette journée pour nous remémorer leurs sacrifices. Si la lutte continue aujourd’hui, c’est parce qu’ils ont eu le courage de lutter », a-t-il déclaré.
Pour lui, la particularité dans la célébration de la journée cette année est la faible participation des délégations étrangères. Pour le Commandant Jean-Pierre Kaboré, l’absence des attachés militaires à la cérémonie pourrait se justifier par la situation politique du pays.
Des anciens soldats burkinabè présents à la cérémonie se sentent honorés. Le Capitaine Passoum Bagagnan a combattu en 1953 auprès des troupes françaises en Algérie.
« Réussir à vaincre l’ennemi, c’est ça le mot d’ordre, la gratification vient après », déclare le Capitaine.
Il a aujourd’hui 92 ans et affirme être le seul Capitaine à l’époque. Il déclare avoir fait le centre d’instruction avec l’ancien Président Thomas Sankara et bien d’autres officiers aujourd’hui à la retraite ou décédés.
« J’ai combattu en Algérie avec les Généraux Lamizana et Baba Sy. J’avais à l’époque le grade de Sergent. L’Algérie cherchait son indépendance face à la France qui ne voulait pas partir à cause des ressources. J’ai vu des choses que je ne peux pas raconter aujourd’hui. Le renseignement algérien me contactait pour avoir des informations sur la France mais sous la coupe de la France, je n’osais pas les renseigner », a-t-il confié.
À notre question de savoir si le Capitaine Bagagnan regrette aujourd’hui d’avoir combattu « auprès du colon contre ses frères africains », il affirme que s’il est vivant, c’est parce qu’il a eu la chance.
« J’ai été prisonnier; j’ai vu certains d’entre-nous qui ont été fusillés », se rappelle-t-il.
Il lance un appel à l’union pour lutter contre le terrorisme.
Pierre Paul Ouédraogo est un ancien gendarme et chef de terre du Pouni, une commune rurale de la province du Sanguié, dans la région du Centre-ouest.
Il a combattu en 1985 lors de la guerre Burkina-Mali, surnommée la guerre de Noël. Il a intégré l’armée burkinabè en 1976 et a pris sa retraite en 2007.
Le président de l’association des Anciens combattants et militaires du Ziro affirme toujours participer au développement de son pays. Il pratique aujourd’hui l’agriculture et l’élevage.
Lors de la guerre de Noël, il était adjoint au Commandant de brigade dans la région du Nord.
« Notre rôle était, entre autres, le renseignement et le combat. Notre secret, c’était la détermination. Nous n’avions pas le droit d’échouer. L’échec n’était pas notre idée et c’est là, notre force », a-t-il relevé.
Pour lui, le contexte n’était pas le même qu’aujourd’hui. Il note en exemple le type d’armes utilisé à l’époque dans les combats qui, selon lui, ne saurait se comparer à ceux d’aujourd’hui.
À l’endroit des militaires au pouvoir, M. Ouédraogo affirme qu’ils « n’ont pas le droit d’échouer; ils doivent se battre au prix de leurs vies, comme leurs aînés l’ont fait. Le combat est l’héritage que leurs aînés les ont légué ».
« C’est par le combat que notre devise « la patrie ou la mort, nous vaincrons » a son sens. On ne peut pas scander un tel slogan et rester assis », alerte-il.