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78ème session de l’AG des Nations Unies: le Mali entre affirmation de soi et recherche de partenaires

Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du Mali, Abdoulaye Diop, s’est exprimé à la 78ème session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies le 23 septembre, à New York. Il a rappelé la « souffrance » du peuple malien face à l’insécurité. Il a également réaffirmé la quête de « souveraineté » du Mali et la volonté du pays d’apporter des solutions aux problèmes des Maliens. Le diplomate a aussi dénoncé une ingérence de puissances étrangères dans la vie politique du Mali. 

La question de la sécurité est une préoccupation majeure au Mali. Devant la tribune de l’ONU, c’est là que le représentant de ce pays pose le curseur en premier. Le Mali fait face, dit-il, aux attaques terroristes mais aussi aux groupes signataires de l’accord d’Alger. Depuis plusieurs mois, le courant passe mal entre Bamako et la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), un groupe politique et armé qui occupe une partie du Mali depuis 2012. Les Forces maliennes ont particulièrement rencontré des difficultés lorsqu’il s’agissait d’occuper les emprises libérées par la MINUSMA.

Comme il fallait s’y attendre, le Mali devant l’ONU est revenu sur cette patate chaude.

« Dans une dynamique d’appropriation nationale, le gouvernement s’attèle à poursuivre la mise en œuvre efficiente et intelligente de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger avec nos frères des mouvements signataires qui le souhaitent », a déclaré Abdoulaye Diop.

Il se réjouit du chemin parcouru depuis la signature de l’Accord en 2015, y compris l’adoption de la nouvelle Constitution qui prend, selon lui, en charge plusieurs dispositions de l’Accord. Le gouvernement a décidé, dit-il, de privilégier désormais le dialogue inter-malien dans le cadre du processus de paix avec les groupes signataires.

« Contrairement à certaines allégations, l’occupation de ces emprises, en tout point conforme aux textes des Nations Unies, ne constitue en aucune façon un acte de belligérance de l’Etat malien vis-à-vis des mouvements signataires », a affirmé M. Diop qui rassure ces mouvements que Bamako leur tend la main.

« Nous continuons de tendre la main à nos frères des mouvements signataires pour une paix durable et un développement harmonieux au profit de nos populations. A cet effet, nous appelons les groupes armés à se démarquer et à cesser les collusions constatées avec les groupes armés terroristes lors des dernières attaques, et ce, conformément à l’Accord pour la paix mais aussi aux différentes résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies », a-t-il affirmé.

Le Mali se restructure après le départ de certaines forces étrangères

Les derniers militaires de l’opération Barkhane ont quitté le sol malien en août 2022. La force onusienne, la MINUSMA, est dans un processus de retrait.

L’armée malienne, appuyée par ses partenaires, notamment l’ex-Wagner, se restructure pour contrer les attaques terroristes. Le Mali voit dans ses décisions une affirmation de soi et un regain de confiance au sein de la population.

« Aujourd’hui, le peuple malien a repris confiance dans son outil de défense. Aujourd’hui, les populations du Mali sont encouragées par les résultats engrangés dans la lutte contre les groupes armés terroristes et leurs sponsors étatiques étrangers », affirme le diplomate. La mission de la MINUSMA a été, dit-il, un échec.

« Après dix ans de présence dans mon pays, la réponse internationale aux défis sécuritaires du Mali n’a pas été à la hauteur des menaces. Les attentes des populations maliennes, maintes fois exprimées par les autorités, ont ainsi été ignorées. La Mission des Nations Unies au Mali (MINUSMA) n’a pas été en mesure d’aider le Mali à rétablir son autorité sur l’ensemble de son territoire, en dépit des moyens importants investis en elle ces dix dernières années. Durant sa présence sur le territoire national, la situation sécuritaire au Mali n’a fait que se dégrader. L’insécurité, qui était cantonnée dans les régions du Nord du Mali, au moment de son déploiement en 2013, a atteint les régions du Centre et du Sud », relève le diplomate malien.

Pour lui, « il était devenu inacceptable pour le gouvernement du Mali de laisser la MINUSMA continuer à devenir partie du problème, en aggravant les tensions entre nos communautés, à travers l’instrumentalisation de la question des droits de l’homme à des fins politiques et servant ainsi des agendas extérieurs de pays hostiles au Mali ».

C’est ainsi, précise-t-il, qu’après une évaluation exhaustive, le gouvernement du Mali a demandé, en juin 2023, le retrait sans délai de la MINUSMA et « nous sommes heureux que le Conseil de sécurité ait accédé à cette requête ».

« Le gouvernement travaille avec la MINUSMA en vue de son retrait ordonné, coordonné et sécurisé du Mali, et ce, dans le délai imparti du 31 décembre 2023, conformément aux dispositions pertinentes de la résolution 2690 du 30 juin 2023 du Conseil de sécurité. Le gouvernement de la République du Mali n’envisage pas de proroger ce délai », annonce M. Diop.

Il rassure les populations maliennes et la communauté internationale que toutes les dispositions sont prises pour la continuité des services de l’Etat après le départ de la MINUSMA. La première phase du processus de retrait s’est achevée et la seconde est déjà engagée.

« Le retrait de la MINUSMA ne signifie pas la fin de la coopération entre l’Organisation des Nations Unies et la République du Mali », précise-t-il. Et il ajoute que son pays tient à son appartenance à l’ONU et que le gouvernement malien reste engagé en faveur des principes et des nobles idéaux de la Charte.

De même, le Mali affirme renouveler son engagement à coopérer avec l’ensemble des Etats du monde qui le souhaitent et qui respectent les principes fondamentaux de sa politique extérieure.

Le Mali en quête de souveraineté dit non aux ingérences étrangères

Concernant les immixtions étrangères, « le Mali dénonce à nouveau et avec force, les ingérences de certaines puissances qui continuent de faciliter les activités criminelles des groupes armés terroristes au Mali et au Sahel », a dit le diplomate malien avant de préciser qu’ « il y a lieu de rappeler que le 15 août 2022, le gouvernement du Mali avait alerté le Conseil de sécurité sur les actes d’hostilité et d’agression de la France. Au lieu de cesser ces agissements, ce pays, membre permanent du Conseil de sécurité, continue, en toute impunité, ses manoeuvres de déstabilisation du Mali et du Sahel, comme en témoigne la récente libération de terroristes dans la zone des trois frontières du Burkina, du Mali et du Niger, en dehors de tout cadre judiciaire et à l’insu des Etats concernés, pour perpétrer plus d’actions terroristes contre nos populations civiles et nos Forces de défense et de sécurité ».

Pour Bamako, l’ancien colon qu’est la France a aussi usé de son soft power (capacité d’un État à influencer et à orienter les relations internationales en sa faveur) contre le Mali.

« Les actes hostiles de la France s’illustrent également par ses interventions intempestives et illégales pour retarder, voire empêcher le traitement de nos demandes de financement dans plusieurs Institutions financières sous régionales, régionales et internationales », a dénoncé le diplomate malien.

Bamako dénonce aussi, de la part de la partie française, une « instrumentalisation » d’organisations contre le Mali.

« Il est regrettable que le même pays tente, et parfois parvienne malheureusement à instrumentaliser des organisations sous régionales africaines, opposant des pays frères les uns aux autres, uniquement pour ses intérêts géopolitiques, dans une démarche néo-coloniale et paternaliste », s’insurge Abdoulaye Diop.

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