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Université Nazi Boni de Bobo : 12 mois de prison requis contre l’ancien président Macaire Ouédraogo

Le professeur Macaire Samdpawindé Ouédraogo, ancien président de l’Université Nazi Boni (UNB) de Bobo-Dioulasso, est poursuivi pour abus de fonction, détournement de deniers publics et enrichissement illicite. A l’audience du 7 avril au tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso, il avait nié les faits. Le tribunal avait suspendu l’audience, après des heures de débats, et renvoyé l’affaire à ce 5 mai. Les débats se sont focalisés, cette fois, sur un détournement présumé de 1 960 000 FCFA. Des témoins ont aussi défilé à la barre. Au terme des débats, le ministère public a requis une peine de 12 mois de prison avec sursis et une amende ferme de 2 millions de francs CFA contre le professeur Ouédraogo.

Il est accusé, entre autres, d’avoir détourné 1 960 000 FCFA destinés à l’achat de carburant pour assurer le fonctionnement de l’université. Ce montant était réparti sur plusieurs cartes de carburant délivrées par des stations-service. Selon le parquet, le professeur Ouédraogo avait en sa possession l’une des cartes.

Le professeur Macaire Ouédraogo affirme cependant que les fonds (1 960 000 FCFA) lui appartenaient. Il s’agit, selon lui, d’un cumul de sa propre dotation en carburant de sept mois, et du reliquat des mois d’avril et mai 2022. En clair, cela lui a été servi avec du retard.

Une note interne lui permettait, dit-il, d’utiliser sa dotation en carburant “comme bon lui semble”. Il affirme également s’en être servi afin de soutenir des associations estudiantines pour leurs activités.

L’ancien président aurait également ordonné au responsable logistique de l’université au moment des faits, de lui envoyer de l’argent pour “motiver des étudiants”. Le montant, 250 000 FCFA, a été prélevé d’une carte de carburant détenue par le service logistique de l’université, explique le parquet. Cette somme était destinée à 25 étudiants, composés essentiellement de délégués généraux de différentes filières. En contrepartie, ils devaient empêcher une manifestation initiée par l’Association nationale des étudiants du Burkina (ANEB) au sein de l’UNB.

Macaire Ouédraogo s’en explique. En sa qualité de président d’université, il avait aussi pour devoir de veiller, dit-il, à la bonne tenue des cours. Il aurait donc agi ainsi pour éviter des troubles susceptibles “d’entraîner la prolongation du retard académique”.

Mais l’Agent judiciaire de l’État (AJE) ne partage pas cet avis. Il affirme, par exemple, qu’aucune note ne permettait à l’ancien président de prélever de l’argent pour une quelconque manifestation. Le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) désapprouve également : “Nous sommes étonnés. Car ce ne sont pas les étudiants qui lui ont demandé de l’argent”, déplore Me Abdoul Fatao Kèra, avocat du REN-LAC.

Me Kèra a donc demandé au tribunal de le déclarer coupable des faits d’abus de fonction, de détournement de deniers publics et de blanchiment de capitaux. Et qu’il paie la somme symbolique de 1 FCFA pour préjudice moral. Il a aussi demandé le remboursement de 1 500 000 FCFA pour les frais exposés et non compris dans les dépens.

L’AJE a également demandé que le prévenu verse 1 FCFA à l’Université Nazi Boni en guise de réparation pour le préjudice moral. Et que l’ancien président rembourse à l’université, un million de FCFA au titre des frais engagés.

Le parquet, lui, estime qu’il y a insuffisance de preuves concernant les infractions de détournement de deniers publics et de blanchiment de capitaux. Rien ne montre selon lui que le prévenu a effectivement reçu la somme de 250 000 FCFA et l’a distribuée à des étudiants. Le ministère public considère aussi que le Pr Macaire Ouédraogo avait la liberté d’utiliser sa carte de dotation en carburant à sa guise.

Il a cependant demandé qu’il soit déclaré coupable pour les faits d’abus de fonction, pour avoir, dit-il, posé des actes en violation des textes qui régissent la passation des marchés publics. Selon le parquet, le Professeur Macaire Ouédraogo aurait signé une reconnaissance de dette de 53 454 000 FCFA et de 12 437 200 FCFA au profit de la société Industrie des Arts graphiques (IAG). Il aurait également signé une convention de partenariat avec le quotidien en ligne bobolais “Ouest Info” sans appel à concurrence. Le montant de la convention s’élève à 4 500 000 FCFA. Et ce n’est pas tout. L’ex-président de l’UNB aurait attribué un marché de réalisation de spots publicitaires et de location d’appareils audiovisuels, entre autres, à une entreprise de la place, sans appel d’offres. Il aurait également attribué un espace aux abords du mur de l’université à une dame pour y exercer son commerce. Le parquet a alors souhaité qu’il soit condamné à 12 mois de prison avec sursis et au paiement d’une une amende de 2 millions FCFA ferme.

Les avocats du Pr Macaire Ouédraogo contestent les réquisitions du parquet. Selon Me Fouseini Diallo, les témoins ont déclaré qu’aucune ligne budgétaire spécifique n’était prévue pour la communication. Ce qui, selon lui, donnait à son client la liberté de collaborer avec les partenaires de son choix.

Concernant l’occupation du domaine public, la défense soutient que le Pr Ouédraogo a agi dans l’intérêt de l’université. Et que l’autorisation d’occuper cet espace a été délivrée par la mairie.

Halte maintenant sur la signature de la reconnaissance de dette. Selon la défense, cela se justifie. « Monsieur le président, le prévenu vous a présenté des vidéos. Et dans ces images, nous avons tous vu les toges et les médailles qui ont été confectionnées », explique Me Adama Ramdé, avocat du prévenu. En clair, le service pour lequel la reconnaissance de dette a été signée a bien été effectué selon lui.

Un autre avocat du prévenu, Fouseini Diallo, abonde dans le même sens: « Le professeur Ouédraogo disposait de deux semaines pour organiser une activité d’envergure internationale. C’est en raison de l’urgence qu’il a contacté la société IAG, avec laquelle l’université avait déjà collaboré », soutient-il. Les avocats demandent donc au tribunal d’en tenir compte. Et d’acquitter leur client.

Le verdict est attendu le 2 juin prochain.

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