
Amidou Compaoré traîne sa bosse dans le domaine de l’enseignement depuis pratiquement 19 ans. Mais ce 27 mai, il n’est pas devant ses élèves. Une affaire assez grave lui colle à la peau. Il est à la barre du Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso. Et il doit répondre de faits présumés d’escroquerie multiple. Face à lui, quatre victimes.
L’un des plaignants, Jules Nana, estime avoir été escroqué. Il avait des problèmes liés aux documents de sa parcelle. Il recourt ainsi, après renseignement, à Amidou Compaoré. Ce dernier promet de l’aider à trouver une solution. Il lui affirme que l’un de ses frères travaille au sein de l’appareil judiciaire, à Bobo-Dioulasso. Et qu’ils pourront rapidement trouver une solution. Mais il n’entend pas le faire gratuitement. Il réclame ainsi à Jule Nana, 38 500 FCFA pour “constituer les dossiers”. Nana lui remet les fonds. Mais surprise ! Il n’obtiendra pas gain de cause. Ses multiples relances restent sans suite.
Mais il n’ y a pas que Nana sur la liste des victimes. Il y a aussi Oumarou Drabo. Ce dernier affirme avoir été escroqué à hauteur de 278 000 FCFA. Dramane Traoré aussi. Lui parle de 4 960 000 FCFA. Blaise Ouédraogo en veut également à Amidou Compaoré de l’avoir escroqué. 500 000 FCFA, dit-il.
Le prévenu, à la barre, reconnaît les faits. Le tribunal lui demande alors d’expliquer comment cela s’est passé.
Compaoré affirme qu’il avait urgemment besoin d’argent pour régler ses dettes auprès d’une banque locale. « Un huissier était à mes trousses. Il a même arraché les fenêtres et les portes de ma maison », explique-t-il. « Ce jour-là, ça m’a fait très mal et j’étais prêt à tout pour avoir de l’argent afin de sauver mon honneur ».
La tentation devient grande. Il découvre sur les réseaux sociaux une certaine Bintou. Cette dernière se présente comme “gourou” d’une secte. Elle lui promet de l’aider à intégrer la secte afin d’obtenir beaucoup d’argent. Et pour cela, elle lui exige des fonds. Le montant exact n’a pas été précisé à l’audience. Amidou Compaoré affirme cependant qu’il ne disposait pas du montant demandé. Il va donc s’activer pour satisfaire celle qui se présentait comme “gourou” de la secte. Et en qui il avait désormais placé sa confiance. Dans l’espoir de devenir, lui aussi, riche, et même très riche.
Il va voir l’un de ses amis, Blaise Ouédraogo. Et il tente de le convaincre de lui prêter de l’argent. Pour y parvenir, il trouve une astuce. Il lui fait savoir qu’il a des problèmes avec son compte en banque et que la banque lui réclame de l’argent pour résoudre la situation. Et comme s’il voulait se montrer plus rassurant, il promet de lui rembourser dans un délai de cinq jours. Blaise Ouédraogo mord à l’hameçon. Il lui remet ainsi 500 000 FCFA.
Mais Amidou Compaoré ne se limite pas là. Il va voir un autre de ses amis, Dramane Traoré. Il lui explique qu’il a besoin d’argent pour régler une ancienne dette bancaire afin de contracter un nouveau prêt. Là aussi, il promet de rembourser une fois le prêt obtenu. Dramane Traoré finit lui aussi par tomber dans le panneau. Il remet à Compaoré 4 960 000 FCFA.
Même manège avec Oumarou Drabo. Là, il parvient à soutirer 278 000 FCFA.
Selon les faits égrenés à l’audience, le montant total frauduleusement obtenu par Amidou Compaoré est estimé à environ 6 millions FCFA.
« J’ai envoyé 850 000 FCFA à Bintou afin d’intégrer la secte », explique-t-il aux juges. Mais une fois la transaction effectuée, plus de nouvelle de Bintou. Elle a “disparu”. Amidou Compaoré lui écrit et réécrit, en vain. Le rêve de devenir riche vole ainsi en éclats.
Et le reste des fonds ? “Je l’ai utilisé pour mes dépenses personnelles”, répond-t-il avec un air de dépit. « Ça fait maintenant 30 mois que je n’ai pas de salaire », affirme-t-il. La banque aurait effectué sur son compte des prélèvements correspondant à des dettes non réglées.
Selon le parquet, l’infraction d’escroquerie est constituée. « Il n’a pas dit la vérité aux victimes. Ce qui les a amenées à lui remettre de l’argent », mentionne le ministère public. Qui a requis contre lui une peine d’emprisonnement de 36 mois ferme et une amende d’un million de francs CFA, en insistant sur la gravité des faits au regard de sa qualité d’instituteur.
Le tribunal a finalement rendu son verdict. Amidou Compaoré a été déclaré coupable des faits d’escroquerie. Et condamné à 24 mois de prison dont 12 ferme, assortis d’une amende avec sursis d’un million de francs CFA.