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Lutte contre le terrorisme au Burkina : les « dozos » réclament un statut particulier

Très actifs dans la lutte contre le terrorisme, la « confrérie » des chasseurs traditionnels, communément appelés « dozos », fait face à une double adversité : celle des groupes armés terroristes et celle des Forces de défense et de sécurité. Face à la situation, ces chasseurs qui refusent d’être assimilés aux Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), réclament un statut d’armée traditionnelle.

Les dozos contribuent, depuis 2018, à la lutte contre le terrorisme. « Nos troupes ont remporté plusieurs victoires dans des zones comme Mangodara, Sindou et Orodara… Même le 3 janvier 2023, nos éléments ont neutralisé près de 46 terroristes dans la zone de Mangodara. Mais nos victoires ne sont pas médiatisées. Les autorités militaires savent de quoi nos troupes sont capables sur le terrain », indique le Coordonnateur de l’Union nationale des dozos, Seydou Konaté, lors d’un entretien accordé à 24heures.bf.

Malgré leur implication dans la lutte contre le terrorisme, ils se sentent délaissés par les autorités compétentes. En effet, depuis l’avènement du terrorisme, ils ont demandé au gouvernement de leur « attribuer un statut particulier, de les former et de les équiper en armes et munitions pour mieux faire face à la menace terroriste ». « La grande majorité de nos éléments travaillent toujours avec des armes de calibre 12, de fabrication artisanaleDans le cadre de la lutte contre le terrorisme, notre union a perdu plus de 20 de ses membres au front. Nous avons également enregistré de nombreux blessés de guerre… », regrette Konaté qui évoque des difficultés concernant la prise en charge des blessées.

« Nous ne sommes pas des VDP… »

Les dozos refusent formellement d’être assimilés aux Volontaires pour la défense de la patrie (VDP). « Nous travaillons sous le volontariat depuis des années. Nous n’avons pas de salaire ; nous refusons donc qu’on nous classe dans le lot des nouveaux VDP. Tout ce que nous voulons, c’est un statut à part », martèle M. Konaté. Il estime que les membres de son association ne sauraient se fondre aux nouveaux VDP pour se rendre au front.

« Nous sommes initiés, mais les VDP, non. Par exemple, dans notre confrérie, il y a des règles et des tabous que seuls les initiés sont susceptibles de comprendre et de respecter. Avant de nous rendre au front, nous faisons des incantations ; chaque membre jure sur des fétiches, tout en faisant le vœu de protéger la vie de son frère d’arme au risque de sa vie », confie-t-il avec assurance. « Si nous refusons d’être assimilés aux VDP, ajoute-t-il, ce n’est pas pour nous sentir supérieurs à qui que ce soit, mais pour éviter des incompréhensions ».

« Les policiers nous ont retiré nos armes… » 

En dehors de ces difficultés, les dozos sont souvent confrontés au retrait de leurs armes par les Forces de défense intérieures. « Tous les commissaires de police et les commandants de brigade ne sont pas d’accord avec l’armement des dozos. Quand les militaires ont besoin de nous, nous les aidons à combattre au front. Une fois, en rentrant chez nous en ville, les policiers nous ont retiré nos armes de calibres 12, sous prétexte que nous n’avons pas de permis de port d’arme », explique le coordonnateur de l’Union nationale des dozos.

Contactée par 24heures.bf, une source sécuritaire apporte des clarifications : « Nous ne sommes pas contre l’armement des dozos. Nous travaillons avec eux, et la collaboration est franche. Nous leur demandons tout simplement de se conformer, en nous approchant, pour acquérir leurs permis de port d’arme ». D’ailleurs, insiste notre source, « dans plusieurs localités, nous avons doté des dozos en armement de guerre et depuis lors, ils nous soutiennent sans problème. Nous avons leurs identifiants et pouvons facilement contrôler les armes qu’ils ont afin que cela ne soit pas un danger pour la population ».

« Le problème, c’est le fait que certains individus, n’appartenant pas à des confréries, se réclament dozos. Un individu lambda ne saurait porter une arme, circuler dans la ville et proclamer qu’il est dozo, sans permis de port d’arme… Recadrer ce secteur relève de nos missions. Nous sommes dans une situation particulière où il est difficile d’identifier l’ennemi. Si nous apercevons une personne qui porte une arme et qui ne peut pas dire clairement, ce qu’il fait avec, nous sommes dans l’obligation de retirer l’arme », explique la source.

Appel au gouvernement

Seydou Konaté, au nom de l’Union, appelle les autorités à les former militairement et à les doter d’armes performantes pour lutter contre l’ennemi. La formation des dozos sur les droits humains, selon lui, est d’une grande urgence. « Majoritairement paysans, nous ne connaissons pas forcément la loi. Souvent, en voulant bien faire, nous pouvons aller à l’encontre de la loi de façon involontaire. Il faut donc que nous soyons formés sur ces points », reconnait Seydou Konaté. 

Du côté des Forces de défense et de sécurité, on estime que cela est bien possible : « Nous avons actuellement besoin de ressources humaines pour la guerre. Les dozos sont les bienvenus. Ils pourront nous aider. Tout ce que nous demandons, c’est qu’ils se conforment aux règles, en nous approchant, afin d’être clairement identifiés ».

Par ailleurs, le Coordonnateur de l’Union national des dozos invite les autorités à se départir des fausses organisations de dozos qui les approchent le plus souvent pour des questions d’argent alors qu’ils ne font que « vadrouiller » en ville, sans se rendre sur le champ de bataille.

Aujourd’hui, la principale revendication de l’Union nationale des dozos, c’est d’avoir officiellement un statut d’armée traditionnelle. Selon eux, la lutte contre le terrorisme vise d’abord à assurer leur propre survie et celle de leur communauté. Car le terrorisme a fortement affecté leur principale source de revenus, l’agriculture. Ils espèrent donc le soutien des autorités.

Un commentaire

  1. La particularité doit être unilatérale.Alors pour moi réclamé un statut particulier d’armée traditionnelle tout en réclamant des armes sophistiquées est peu contraire quant on connait bien l’origine et le mystère de cette confrérie.Ils sont les gardiens de la tradition ancestrale, qu’ils en prennent grand soin et la perpétuent pour les générations futures.

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